Seul

Le temps de la diplomatie était passé. Ce n’était pas comme ça qu’il réussirait à prouver la compromission des Sœurs. La compromission ? Non, la forfaiture de celles qui se font passer pour gardiennes et protectrices de la tradition.
A trop vouloir patienter et écouter les Cheikhs, Ifrah’ avait perdu son temps… et gagné de nouvelles cicatrices. Si le dialogue des Cheikhs était impuissant, ou trop lent ce qui revenait au même, le belluaire devait rechercher de nouveaux alliés pour pousser les Ermadhi à l’action.

C’est peu après son retour d’Asfar que sa mère lui révéla ce qu’il avait essayé de comprendre durant son enfance. Comment elle s’était enfuie d’Hammarat, les passages et chemins jusqu’au califat de la Blanche Robe, le rôle ambivalent de la milice Ermadhi et les galeries où se cachent les Sorhna dissidentes.
Chaque phrase était source de nouvelles questions, mais Ifrah’ n’osait pas l’interrompre. Il attendait impatiemment qu’elle lui parle de son père. Elle continua en racontant le désir de certaines Sœurs parmi les plus importantes de maîtriser les quatre éléments et leurs expériences avec les ardentes. Elle raconta les cabinets d’étude de l’alchimie des Aurloks ou des autres peuples et les rumeurs concernant la possession d’un rameau du Beathacrann. Elle parla surtout de la créature qu’elle vit s’échapper du cabinet d’une doyenne, les dégâts qu’elle causa et les morts qu’elle provoqua. Sa voix tremblait quand sa mère évoqua les cris des Sœurs agonisantes et le silence qui suivit l’entrée de Chahida. Ce silence assourdissant qu’elle ressent toujours et qui la réveille encore de trop nombreuses nuits, ce silence bien plus effrayant que la créature elle-même.

Ifrah’ écouta longuement, il ne pouvait plus nier la duplicité de la Sororité, ni l’accepter. Son énergie allait relayer celle de sa mère, mais pas pour recueillir et protéger les fuyardes comme le faisaient les Ermadhi. C’était directement à la source qu’il voulait s’attaquer, à Hammarat. Il ne lui restait qu’une chose à faire. Sa mère n’avait toujours pas parlé de son père.
Il l’interrogea, brièvement mais d’une voix claire, et elle ne répondit pas…

De nouveau il se retrouvait seul. Seul il errait dans les neiges lorsque ses parents se disputaient, seul il se retrouva parmi les nomades d’Asfar, seul devant le frayeurs et silences de sa mère. Seul maintenant devant l’inertie des Cheikhs.
Seul il chercherait cet Ifrit qui a dévasté le pénitencier. Dut-il y recevoir de nouvelles cicatrices, ou pire…

C’est vers le sud qu’il marchait maintenant. L’ancien temple dans lequel il s’était réfugié une nuit avec les belluaires du désert lui revenait en mémoire. Ses ruines fracassées présentaient de trop nombreux points communs avec l’aspect actuel du pénitencier pour qu’il n’en tienne pas compte.
C’est en Asfar qu’il retrouverait les traces de l’Ifrit.

Alors qu’il approchait du califat du Jardin des Larmes, Ifrah’ observa de loin le marché d’une petite ville. Un groupe de Khalimans y menait une étrange négociation avec la Triade.
Le comportement d’un Malikh malingre attira surtout son attention. Quelque chose dans sa mémoire, un souvenir fugace, ou plutôt les traces d’une histoire de sa mère.
Ça allait lui revenir…

La place du marché et ses étals manifestement vides. Etrange !

Les membres de la Triade accompagnés d'un grand cavalier et les Khalimans qui suivent le Kabircheikh. Encore lui !

Les Khalimans, pourtant véloces, subissent encore les directives attentistes du Kabircheikh et restent en retrait.

Le cavalier de la Triade en profite pour foncer sur un Ghulam, mais sa charge reste sans effet. Se peut-il qu'il ait été influencé par les paroles enjoleuses de Hakim ?

Près d'un autre étal, Lee Ping engage le combat. Mal lui en prend, il tombe malgré l'assistance d'une ombre.

Au centre, le faible Malikh observe tout, surtout l'alchimiste de Jade. Qui est-il ? Je suis sûr que son nom est caché quelque part dans ma mémoire.

Les Khalimans semblent avoir réussi leur négociation...

Le regard d'Ifrah' s'attarda un instant sur le Malikh et vit ses yeux, ils étaient crevés. Son histoire lui revint instantanément, Abdelan ! Suivant son regard, il reporta son attention sur le Kabircheikh. Celui-ci venait de laisser le cavalier repartir avec le négociant.
Comment avait-il pu le laisser s'échapper ?

Abdelan reporta son regard vide vers Ifrah' et dirigea ses pas vers lui, délaissant le marché.

Comments

[Captain Caverne]

Super récit comme d'hab ! Très agréable à lire. J'espère que tu nous fera une petite compil' à la fin des chroniques :)